32 - Retour en FranceDeux jours après la réception d'adieux, le cortège français reprit le chemin de Paris sous une pluie battante, qui ne relâcha pas un
seul instant pendant leur voyage, y comprit pendant la traversée. Il ne s'agissait pas d'une tempête, mais d'une pluie drue, qui tombait en un rideau
épais et glacé sur le groupe. Les capes protégeaient à grand peine les cavaliers contre la furie des éléments, et la
visibilité était grandement réduite de part et d'autre du chemin. Ils atteignirent péniblement et tard dans la soirée, Amiens, leur
ville étape entre Calais et Paris, où la chaleur d'un feu crépitant fut accueilli avec un contentement non dissimulé. Lorsqu'ils
repartirent le lendemain, la pluie n'avait pas cessé. Le chemin était glissant, quasiment impraticable, et le Capitaine songea un instant qu'ils auraient
du prolonger leur escale à Amiens, et attendre une accalmie. Peu avant la ville de Clermont, un pan de colline avait dégringolé sur les
pavés de la route, qui n'était plus qu'un enchevêtrement de branchages et de boue. Le cocher hésita un instant, mais il était de
toute façon un peu tard pour rebrousser chemin. Une fois cet obstacle franchi, ils seraient proches de Paris. A mi-chemin, la roue s'enfonça brusquement
dans une ornière de la route, dissimulée sous un amas de fange. Le carrosse tangua dangereusement, prêt à basculer, et les chevaux se
cabrèrent en hennissant furieusement. Tout le cortège s'immobilisa et se regroupa précipitamment. Les mousquetaires sautèrent à bas
de leur monture et se regroupèrent autour de l'attelage. Le Roi, la Reine et Constance en descendirent, et s'abritèrent tant bien que mal sous l'arbre le
plus proche, tandis que les mousquetaires examinaient les dégâts occasionnés sur la roue. Après un long moment de palabres sur la meilleure
façon de sortir le véhicule de son carcan marécageux, Porthos eut un mouvement d'impatience :
- Il suffit, nous n'allons pas passer la nuit ainsi, à discuter. Ecartez-vous, je vais résoudre le problème, avant que leurs Majestés
n'attrapent un refroidissement !
Il remonta ses manches, et, se jetant auprès de la roue, au fond de l'ornière, empoigna l'essieu bloqué et le souleva de toutes ses forces. Athos
et D'Artagnan se précipitèrent pour lui prêter main forte, tandis qu'Aramis se précipitait auprès des chevaux, les fouettant
énergiquement au moment où la roue se retrouva au niveau du chemin. Les chevaux tendirent leur harnais, les trois hommes donnèrent un violent coup
de rein, et le carrosse sauta en avant, s'arrachant à la masse boueuse pour progresser enfin sur le chemin. Les chevaux dérapèrent, surpris par la
disparition brutale de la résistance de leur harnais, et bousculèrent Aramis qui s'étala à son tour dans la boue. Dès que les
occupants de la voiture eurent repris leur place, les quatre compagnons s'entre-regardèrent et éclatèrent de rire.
- Nous voilà tous avec une fière allure, il ne fait aucun doute que nous ne passerons pas inaperçus en entrant dans Paris, constata D'Artagnan.
- Allons Messieurs, un peu de sérieux. Il ne nous faut pas perdre davantage de temps si nous voulons atteindre le but de notre voyage.
Le Capitaine de Tréville leur avait adressé un sourire, fier de ses soldats qui ne se laissaient pas abattre par les intempéries et la fatigue.
Ils acquiescèrent et remontèrent aussitôt en selle. Athos prit soin de vérifier l'état de la roue, elle ne s'était pas
brisée, mais était visiblement fragilisée. Averti, le Capitaine ordonna de ralentir l'allure afin de ménager l'essieu, mais la troupe
parvint malgré tout reprendre le chemin. La pluie cessa finalement alors que le groupe arrivait en vue de premiers toits de Paris. Constance se pencha par la
fenêtre avec un sourire radieux.
- Foi de Porthos, je crois qu'un plantureux repas sera le bienvenu, s'exclama le géant.
Aramis ne put s'empêcher de le taquiner&nbps;:
- Je crois qu'il vaudrait mieux commencer par un bon bain, compte tenu de l'état de votre pourpoint ! En tout cas, moi je ne pense qu'à un baquet d'eau
fumante, pour me débarrasser de toute cette tourbe.
D'Artagnan eut un petit rire malgré lui, songeant à l'époque où il vendait des bains avec l'aide de Jean, aussi renchérit-il :
- Dois-je en conclure que je dois vous envoyer Jean dès mon arrivée chez Maître Bonacieux ?
- Inutile mon ami, il y a si longtemps que vous n'êtes plus passés dans les rues que j'ai du apprendre à me débrouiller seule pour prendre
un bain… mais j'aurai peut-être un peu d'aide aujourd'hui…
Elle laissa sa phrase en suspens, glissant un regard discret à Athos, qui lui répondit d'un sourire chaud. Une fois entrés dans la ville, les
mousquetaires escortèrent leur souverains jusqu'au palais du Louvre, puis demandèrent la permission de se retirer pour prendre enfin quelque repos, ce
que le Capitaine de Tréville leur accorda immédiatement, les remerciant de leur efficacité. |
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21 - Incertitudes 22 - Le passé d'Athos 23 - Une nouvelle mission 24 - Voyage vers l'Angleterre 25 - Au hasard d'une halte 26 - Un nouveau secret 27 - Le pied marin 28 - Sur le sol anglais 29 - D'Artagnan a des ennuis 30 - Règlement de compte 31 - Le grand bal du départ 32 - Retour en France 33 - Revirement 34 - Déchirements 35 - Révélations 36 - Le temps des explications 37 - Face au Capitaine 38 - Le pavillon de Versailles 39 - Engagement d'éternité 40 - Le remplaçant
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