- Athos !!!
D'Artagnan tambourinait à la porte de son ami. Celui-ci s'éveilla en sursaut, les éléments de son univers se remirent lentement en place.
A ses côtés, Aramis se frottait les yeux, l'air étonné, il n'avait donc pas rêvé ce qui s'était passé entre eux
cette nuit-là. L'instant d'après ils avaient réalisé et se précipitait sur leurs vêtements. Aramis se cacha derrière
la porte qu'Athos, simplement vêtu de son pantalon, venait d'ouvrir. D'Artagnan parut soulagé :
- Enfin, j'ai bien cru que vous aviez également disparu ! Je cherche Aramis ! Personne ne l'a vue depuis plusieurs heures, savez-vous où elle se trouve ?
Athos hésita, jeta un œil à la jeune femme à moitié vêtue qui haussa les épaules et se découvrit à
jour. D'Artagnan eut un mouvement de surprise, puis un sourire amusé se dessina sur son visage. Il entra dans la pièce et referma prudemment la porte
avant d'ajouter :
- Il semble que cela va se compliquer… Je vous abandonne alors que vous vous chamaillez et je vous retrouve ainsi… J'avoue que je n'avais pas
imaginé une telle réconciliation aussi rapidement !!!
Il rit un instant de leur mines penaudes.
- Mais peu importe, la situation s'est dégradée, les troupes italiennes sont rentrées sur notre sol dans un endroit isolé de la
montagne… Venez, il ne faut plus perdre de temps !
Athos et Aramis échangèrent un regard anxieux, et emboîtèrent le pas à D'Artagnan. Une fois parvenus au campement, ils le suivirent
dans sa tente, où s'étalait une immense carte de la région.
- Les troupes italiennes se sont infiltrées par le passage le plus improbable, en franchissant ce col proche d'un des plus hauts sommets. Ils descendent
à présent dans la vallée en contrebas où se tient le village de Chamouny. C'est un endroit on ne peut plus isolé, et sans la
surveillance de toutes les voies d'accès que j'avais ordonnée, jamais on n'aurait pu savoir qu'ils avaient pénétré le territoire.
Il pointa le village sur la carte, il s'insérait entre deux formations montagneuses qui laissaient une longue et étroite vallée,
légèrement oblique, entre le nord et le sud. D'après la position du campement, leur seul accès était par le sud de la vallée.
Aramis prit alors la parole :
- Je vais emmener la cavalerie par l'ouest de la vallée, en traversant cette zone montagneuse dite des pics rouges, et remonter le plus possible au nord du
village. Ainsi nous pourrons les prendre à revers. Ils vous attendent par le sud, mais n'imaginent sans doute pas être pris en tenaille entre notre
infanterie au sud et la cavalerie au nord.
Athos secoua la tête :
- C'est une folie, Aramis. Comment savoir si tu pourras emmener assez vite tous nos chevaux par une voie aussi difficile. Sans compter que l'absence de la cavalerie
leur semblera louche.
- Dans ce cas, divisons la troupe en deux parties, et l'une des deux vous appuiera.
- Et si tu ne parviens pas au nord de la vallée ?
- J'y parviendrai, je vous en fais le serment. J'ai préparé mes hommes à ces conditions, ils me suivront jusqu'à la plus haute de ces
montagnes, s'il le faut.
D'Artagnan hésita un instant, mais reconnut que la stratégie proposée par Aramis leur donnerait un avantage qu'il ne fallait pas négliger,
compte tenu de leur handicap numérique. Il donna donc son accord pour le départ de la cavalerie pour le nord. Au moment de se séparer, Athos
retint Aramis dans la tente où ils avaient établi leur plan :
- Je t'en conjure, sois prudente… Le chemin que tu comptes prendre sera à peine praticable.
- Sans doute… Mais j'y parviendrais, et peut-être auras-tu alors à nouveau confiance en moi et foi en mes capacités.
- Je ne doute pas que tu puisses y parvenir, je sais quel mousquetaire tu es Aramis… Seulement j'ai peur de te perdre au moment où je viens de comprendre
combien j'ai besoin de toi…
- Essaie de me faire confiance, et prend garde à toi de ton côté… N'oublie pas que tu n'es pas encore guéri de ta blessure. C'est
ton sort qui m'inquiète le plus !
Elle ne put ajouter un mot de plus : Athos l'avait embrassé. Elle eut du mal à s'arracher à lui.
- Je t'aime, Athos.
Elle sortit en courant, rougissant de son propre aveu, et sauta sur son cheval pour prendre la route avec ses hommes. Athos, lui, rejoignit d'Artagnan à la
tête des fantassins, les oreilles bourdonnant des dernières paroles de la jeune femme.