12 - RésistanceIl finit par la trouver, assise, pensive, dans un des jardins du château. Elle esquissa un sourire en le voyant arriver, mais son regard restait
mélancolique. Il parla sans détour :
- Ne soyez pas si triste Aramis, je pense que tôt ou tard vous percerez sa carapace… Athos porte les mêmes sentiments que vous en lui, mais il
ne veut oublier sa fierté pour vous tendre la main.
- Qu'il soit fier, je n'en doute pas… Fier et têtu, comme tous les hommes… mais je doute que vous ayez raison quant à ses sentiments,
dit-elle d'un ton désabusé. Et puis que savez-vous des miens pour nous comparer ?, ajouta-t-elle en se forçant à sourire.
- Il y a déjà quelques temps que j'ai lu l'amour dans vos yeux, Aramis… N'oubliez pas que je suis un homme amoureux moi aussi, et il y a dans
vos yeux, quand vous veillez sur Athos, la même flamme que celle qui danse dans les yeux de Constance. J'ajouterais que ce n'est d'ailleurs pas la
première fois que je la surprends.
Aramis resta sidérée, ne sachant que répondre à celui qui avait si bien lu dans son cœur… Elle était donc incapable
de cacher ses sentiments pour Athos, comme elle l'avait craint depuis des mois… Elle baissa piteusement la tête.
- En revanche, je me dois d'aborder un sujet moins réjouissant, la cavalerie sera là demain, serez-vous en état d'en prendre le commandement ?
- Bien entendu, D'Artagnan, vous pouvez compter sur moi… D'autant que vous en avez déjà fait énormément avec fort peu d'aide de
notre part.
- Parfait, je vous remercie et vous dis à demain.
Après une tape sur l'épaule, il disparut. Aramis retourna auprès d'Athos pour le prévenir.
- Je ne serai pas là demain, la cavalerie arrive et D'Artagnan a besoin de moi.
- Que voulez-vous que cela me fasse ? Ne comprenez-vous pas que je n'ai nul besoin de vous ?
Aramis ne répondit pas et reprit sa place habituelle, au chevet du blessé, qu'elle veilla jusqu'au lendemain, sans qu'une autre parole ne soit
échangée. Elle partit au petit jour, avant même le réveil de son compagnon, sachant à quel point il serait heureux d'être
débarrassé d'elle pour la journée. Elle parvint au campement peu avant la cavalerie, ce qui lui permit de prendre ses premiers repères,
et de choisir l'emplacement le plus approprié à son installation, pour tenir les chevaux le plus à l'abri possible des brusques changements de
temps, si fréquents en haute montagne. Lorsque le contingent fut arrivé, elle reprit son autorité habituelle, en parcourant les rangs des
cavaliers. Certains chevaux semblaient exténués de la longue route pour atteindre la Savoie, et elle donna des ordres pour que les animaux soient
soignés très rapidement. On ne pouvait prendre le risque d'avoir des chevaux défaillants. Plusieurs avaient perdu des fers, il fallut
dépêcher un messager au village le plus proche pour y trouver un maréchal-ferrant. Fort heureusement, grâce à la douceur de
l'automne, les vallées n'étaient pas encore enneigées, et les pâtures restaient verdoyantes, offrant de quoi rassasier tout les chevaux
sans efforts. En fin d'après-midi, elle retrouva D'Artagnan :
- Tout est en ordre, mon ami. Les cavaliers seront prêts à démarrer l'entraînement après une solide nuit de repos.
- Vous avez fait un travail remarquable… Par quoi pensez-vous commencer demain ?
- Il faudra consacrer le peu de temps dont nous disposons à s'entraîner en haute altitude, la plupart des chevaux et des hommes n'y sont guère
habitués, et je veux qu'ils soient efficaces quel que soit le lieu que choisiront les Italiens pour passer à l'action.
- Voilà qui est sage. Les chevaux ne sont en effet pas habitués à se trouver sur des zones aussi escarpées, cela risque de ralentir les
manœuvres d'approche.
Aramis hocha la tête avec un sourire. D'Artagnan ne put s'empêcher de remarquer le visage fatigué de la jeune femme :
- Je crois que vous aussi devriez aller prendre une solide nuit de repos, Aramis.
- C'est gentil à vous, D'Artagnan, mais je ne compte pas passer la nuit ici.
- Retourner à Chambéry est une folie, vous ne pourrez dormir suffisamment.
- Je le sais, mais je ne peux rester ici, je suis inquiète pour lui… Je serai de retour au lever du jour, ne nous en faites pas pour moi. N'oubliez pas
que je n'ai pas fini de livrer bataille là-bas ! |
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1 - Le complot de Savoie 2 - En route pour le Duché 3 - Un chemin détourné 4 - Embuscade armée 5 - Découverte imprévue 6 - Chacun ses secrets 7 - Négociations pour la Savoie 8 - Echec 9 - Sur le pied de guerre ! 10 - Ingratitude 11 - Une étrange réponse 12 - Résistance 13 - Fierté et faiblesse 14 - Aveux 15 - Abandon 16 - Avancée des troupes 17 - La bataille de Chamouny 18 - Retour à Paris 19 - Le jugement de Jussac 20 - Le couple interdit
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